top of page

Réseaux Sociaux : Les enjeux de la conservation de la preuve et la notification d'un licenciement

Updated: Sep 16, 2022

Les nouvelles technologies ont conduit à une complexification des relations employeur/salarié.

Ainsi, l’utilisation par les salariés des réseaux sociaux, relevant par principe de leur vie privée, peut avoir un impact sur les relations de travail dès lors qu’ils se consacrent à cette activité durant leur temps de travail ou que des posts peuvent concerner la société.

Quelles sont alors les sanctions pouvant le cas échéant être prises par la société et, comment permettre de s’assurer de la recevabilité des preuves de manquements éventuels ?


Article réseaux sociaux réseau COLEX

L'utilisation des réseaux sociaux pendant le temps de travail : seul l'abus peut être sanctionné


Le salarié doit, par principe, se consacrer à son activité professionnelle durant son temps de travail. Cette obligation étant la justification même du versement de sa rémunération.


Dans ce contexte, il a pu être jugé que l’employeur est en droit de contrôler l’activité du salarié, et notamment ses connexions internet.


Ainsi, l’historique de connexions internet d’un salarié n’est pas considéré comme relevant de la vie privée du salarié. Le salarié est ainsi présumé s’être connecté à internet pour des motifs professionnels de sorte que l’employeur est en droit de vérifier lesdites connexions (Cass. soc. 9 juillet 2008, n°06-45800).


De la même manière, la liste des sites favoris créée par le salarié peut être contrôlée par l’employeur (Cass. soc. 9 février 2010, n°08-45253).


L'utilisation d’internet durant son temps de travail ne justifie toutefois pas nécessairement le licenciement du salarié.



> Ainsi, il est tout d’abord nécessaire de démontrer que le salarié est bien à l’origine des connexions.


En effet, dans une affaire où le salarié contestait être l’auteur des connexions sur des sites pornographiques, la Cour a relevé que, dès lors que la connexion était réalisée uniquement via les initiales du salarié et que ses identifiants de connexion étaient donc connus de tous, d’autres salariés avaient pu se connecter à ces sites par le biais de son ordinateur (Cass. soc. 3 octobre 2018, n°16-23968).


Il n’était donc pas démontré, de manière indéniable, que le salarié était bien à l’origine de ces connexions.


Enjeux réseaux sociaux article

> En outre, l’usage d’internet par le salarié doit être considéré comme abusif.


Ainsi, un salarié publiant des tweets durant la journée évalués à hauteur de 4 minutes/jour n’est pas considéré comme ayant adopté un manquement fautif.


La Cour d’Appel de Chambéry a ainsi jugé que «Sur le premier point, la société E reproche à son salarié l'envoi de 1336 tweets non professionnels pendant le temps de travail, depuis l'embauche ; quand bien même ce grief serait avéré nonobstant l'absence d'horaire d'envoi des tweets il apparaît, à supposer dans une estimation particulièrement large que chaque envoi ait requis un temps de 1 minute, que l'envoi de l'ensemble des 1336 messages correspond en moyenne à moins de 4 minutes par jour au cours des semaines où monsieur X... travaillait 5 jours et moins de 5 minutes par jour si l'on retient les semaines de 4 jours à compter de janvier 2011, et ce en tenant compte des congés du salarié ;


L'envoi également reproché de 90 tweets en 2 mois, correspond à l'envoi de moins de 3 tweets par jours travaillés (4 jours par semaine) soit moins de trois minutes ;


Compte tenu du fait que le salarié n'était soumis à aucun horaire ainsi que le prévoit expressément son contrat de travail, le fait d'avoir le cas échéant, pu consacrer un temps aussi limité à l'envoi de tweets non professionnels, y-compris à des horaires communément retenus comme travaillés ce qui n'est pas démontré, alors que le salarié était au demeurant du fait de ses fonctions, connecté à internet de manière quasi continue, ne peut être retenu comme fautif ; » (Cour d'Appel de Chambéry, 25 février 2016, n°15/01264).


Une utilisation « raisonnable » d’internet à des fins personnelles ne sera ainsi pas considérée comme justifiant le licenciement d’un salarié.



Publications dénigrantes sur les réseaux sociaux


Au-delà de son contenu, la publication de propos insultants vis-à vis de son employeur peut être appréhendée de manière différente selon la publicité effectivement donnée par le salarié aux critiques.


Ainsi, il a été jugé qu’une publication litigieuse dans un groupe restreint créé sur Facebook ne caractérisait pas une faute grave justifiant le licenciement dès lors qu’au regard du nombre réduit de personnes membres du groupe (14), cela était assimilable à une conversation privée (Cass. soc. 12 septembre 2018, n°16-11690).


publication dénigrante réseaux sociaux article

En revanche, le licenciement d’un salarié ayant publié sur un groupe Facebook, suivi par 112.000 Followers, ensuite de l’annonce de l’ouverture du magasin l’employant le dimanche :

« Aller y travailler le dimanche bande de charlot c pas vous qui vous lever et qui n'aver pas de vie de famille nous faite pas chier à venir le dimanche ! ! ! ! ! ! ! » est justifié (Cour d’Appel de Reims, 15 novembre 2017, n°16/02786).



Publications sur les réseaux sociaux et manquements à son obligation de confidentialité


L’utilisation répandue des réseaux sociaux a pu conduire à des difficultés tenant au respect par les salariés de leur obligation de confidentialité.


Ainsi, une salariée a diffusé la photographie du défilé de la nouvelle collection préparée au sein de la société dans un compte Facebook, certes privé, mais comptant plus de 200 “amis” professionnels de la mode.


Compte tenu du secteur très concurrentiel de la mode et de l’impossibilité pour la salariée de contrôler la diffusion de cette photographie par les autres membres du Groupe, un manquement à son obligation de confidentialité constitutif d’une faute grave était caractérisé (Cass. soc. 30 septembre 2020, n°19-12058).


Il en est de même de la publication sur LinkdIn des photographies d’un moteur développé par la société et émanant de documents internes confidentiels (Cour d’Appel de Paris, 23 février 2022, n°19/07192).



Contrôle de l'activité des salariés sur les réseaux sociaux et validité de la preuve


Les nouvelles technologies ont conduit à la nécessité d’une adaptation de sa position par la Cour de cassation sur les modes de preuve.


La Cour de cassation avait pu juger qu’était illicite l’extraction, via le compte Facebook d’un collègue de travail, des publications privées d’un salarié (Cass. soc. 20 décembre 2017, n°16-19609).

Elle a toutefois nuancé récemment sa position dans l’affaire précitée de publication d’une collection de mode.

L’employeur a licencié la salariée pour faute grave compte tenu de cette publication accessible à d’autres salariés de la société ainsi qu’à des entreprises concurrentes.

La salariée a contesté son licenciement en faisant valoir l’illicéité de la preuve compte tenu du caractère privé de cette publication.

Or, la Cour de cassation précise que, si, par principe, la production d’éléments issus de publications Facebook privées est illicite, celle-ci ne peut faire l’objet d’un rejet si elle est indispensable à l’exercice du droit de la preuve et proportionnée au but poursuivi (Cass. soc. 30 septembre 2020, n°19-12058).


La production d’éléments issus du compte Facebook ne sera donc pas nécessairement justifiée mais pourra être déclarée licite si elle est indispensable à la démonstration du manquement.

Il en sera notamment ainsi lorsque le motif même du licenciement est la publication.



Axelle Mataix et Caroline MO font partie du réseau COLEX.
Créé en 2021, le réseau COLEX réunit plusieurs professionnels du droit accompagnant les institutionnels et entreprises au quotidien : Avocats en droit social, droit des sociétés, droit fiscal, droit commercial, droit de la propriété intellectuelle et du numérique, droit immobilier, droit de l’urbanisme et droit de l’environnement, ainsi qu’un Huissier de Justice.

Les membres du réseau COLEX travaillent depuis plusieurs années ensemble et ont souhaité structurer leur partenariat afin de toujours mieux assister les entreprises et institutionnels.

Le réseau COLEX, un réseau pluridisciplinaire pour vous accompagner.


Comments


bottom of page